C’est triste et malheureux une paroisse sans prêtre

Le vent a changé de direction, et le bruit du canon s’estompe presque complètement.
Aujourd’hui, on célèbre l’anniversaire de Guillaume II. Dès 6 h 30, une parade militaire accompagnée de musique défile dans les rues. Une messe en musique est organisée à Comines-France. Tout au long de la journée, la ville vibre au rythme des concerts, des cortèges et des fanfares militaires. Le drapeau flotte fièrement sur plusieurs maisons, et de nouvelles capotes ont été distribuées aux soldats.
Les habitants de Ten Brielen expriment leur désarroi : « Une paroisse sans prêtre, c’est une tristesse et un malheur qu’on ne peut imaginer. »
À Ploegsteert, l’ennemi commence ses bombardements nocturnes. À cette époque, l’adjudant Tavernier, ancien commandant de la brigade de gendarmerie de Comines, est encore en fonction. Selon Maurice Ceulenaere, la population parvient à se ravitailler correctement grâce à l’armée britannique. Cependant, le choix de viande est limité : on vit l’âge d’or du « Bully Beef ». Ces boîtes de conserve polyvalentes servent aussi bien de marchepieds pour les tranchées que d’autels improvisés pour les offices religieux au Mont de la Hutte. Les boîtes de rations, rares mais prisées pour leur sauce, et les confitures importées d’Angleterre, obtenues par troc, complètent l’approvisionnement. La confiture de fraises, très convoitée, est réservée par les fourriers, surnommés par les soldats britanniques « voleurs de confiture de fraises ».
À Messines, les derniers murs debout s’effondrent, blessant ou tuant parfois ceux réfugiés dans les sous-sols. Les ordres absurdes coûtent parfois des vies, comme cet officier ayant envoyé son ordonnance chercher un porte-plume et une règle : l’homme a été abattu en chemin.

De retour à Comines, la soirée se termine au régiment avec quelques bières.