Saint Omer un hôpital de fortune

Le temps est aujourd’hui épouvantable, si bien qu’aucun concert n’a lieu.
La fusillade continue de se faire fortement entendre la nuit, particulièrement vers Quesnoy-Warneton, tandis que la canonnade demeure intermittente durant la journée.
Sur la ligne Hollebeke-Zandvoorde-Cruyseecke, le silence règne depuis une quinzaine de jours.
Est-ce la réalité ou seulement une rumeur parmi tant d’autres ?
Il semblerait que les obus s’abattent en grand nombre sur Warneton et Quesnoy, au point que cette dernière ville ait dû être évacuée.
Les blessés et malades en provenance d’Ypres sont désormais pris en charge à Saint-Omer, dans le grand cloître des Frères, où jusqu’à 900 patients peuvent être accueillis. À la tête de l’hôpital se trouve un colonel anglais, assisté d’infirmières britanniques. Un capucin belge et quelques soldats belges contribuent également au bon fonctionnement de l’établissement.
Guillaume Apollinaire agrémente son calligramme1, extrait du poème du jour (Poème à Lou) :

Reconnais-toi
Cette adorable personne c’est toi
Sous le grand chapeau canotier
Œil
Nez
La bouche
Voici l’ovale de ta figure
Ton cou exquis
Voici enfin l’imparfaite image de ton buste adoré
vu comme à travers un nuage
Un peu plus bas c’est ton cœur qui bat
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- Le terme « Calligrammes » a été inventé par Guillaume Apollinaire. Il résulte de la contraction de « calligraphie » (du grec kallos, signifiant l’art de l’écriture) et « idéogramme » (du grec gramma, désignant un dessin représentant une idée).
Le calligramme se distingue par sa forme visuelle : les mots et phrases poétiques dessinent une image, créant ainsi un lien entre le texte et sa représentation graphique. Apollinaire y voit une évolution naturelle de la poésie vers-libriste, où l’esthétique de l’écriture rejoint le sens des mots.
Dans ses Calligrammes, il évoque la guerre des tranchées, la perte des camarades, l’attente de revoir un être cher, le poids du temps et des souvenirs, ainsi que le fracas des obus et des canonnades. Son œuvre, profondément marquée par la Première Guerre mondiale, témoigne de son désir d’« écrire en beauté » malgré les horreurs du conflit. ↩︎